
60 élèves de Première et classe passerelle encadrés par 1 professeure de théâtre, 2 professeures d’HLP, 1 professeur documentaliste

Ramata-Toulaye Sy, ancienne élève du Lycée Georges Braque à Argenteuil, est venue à la rencontre des lycéens pour partager son parcours, son expérience de scénariste et réalisatrice ainsi que quelques conseils pour leur avenir.
En arrivant dans l’établissement, Ramata-Toulaye Sy a confié garder peu de souvenirs de son lycée, mais a tout de même été marquée par sa professeure d’histoire. Pour ouvrir la rencontre avec les élèves, elle a évoqué son parcours. Après son lycée, elle a choisi de se tourner vers des études d’histoire à l’université, avant une réorientation vers le cinéma. Elle a tenté le concours, exigeant et sélectif, de la Fémis et a intégré le département « scénarisation » du premier coup. Par la suite, elle a rapidement trouvé ses premiers projets en tant que scénariste et a été sollicitée à plusieurs reprises pour réaliser, mais elle a décliné, attendant de gagner en maturité et en expérience. Elle a fini par réaliser un court métrage, puis son premier long métrage au Sénégal. Aujourd’hui, elle continue d’écrire, travaillant notamment sur le scénario du prochain film de Jean-Pascal Zadi, tout en réfléchissant à sa deuxième réalisation, qui prendra cette fois place en banlieue parisienne.
« Ce que j’ai remarqué lors de mon parcours entre mon lycée et l’université, c’est qu’il faut explorer beaucoup de choses et pas s’enfermer dans un domaine »
Les élèves ont posé de nombreuses questions sur son film Banel & Adama, que certains avaient vu et étudié en amont avec leurs professeurs. La réalisatrice est revenue sur ce projet, écrit pour son diplôme de fin d’études à la fémis, qui, difficile à financer, a mis 4 ans à aboutir. Ramata-Toulaye Sy souhaitait faire une grande histoire d’amour, un Roméo et Juliette au Sénégal, en réponse aux représentations et aux clichés que l’on voyait sur ce pays, souvent associé au conflit et au drame. Elle a évoqué les enjeux narratifs, ses références et ses choix de photographie. Inspirée par les grandes tragédies, elle a exprimé son attachement particulier au personnage de Banel et sa quête d’indépendance, dans laquelle elle se reconnaît. Elle a expliqué que les couleurs se dégradaient au fur et à mesure du film, comme la relation des personnages.
Questionnée par un élève sur l’importance du texte et de l’interprétation des acteurs, la scénariste a précisé qu’elle n’aimait pas l’improvisation. Plus jeune, elle avait fait du théâtre et elle sait comment le dialogue sonne en l’écrivant. Pour Banel & Adama, le casting a été un grand enjeu : elle souhaitait recruter des acteurs professionnels, mais c’était difficile, voire impossible, dans cette région du Sénégal. Pour Banel, Ramata-Toulaye Sy a croisé la future actrice, Khady Mane, dans la rue et lui a proposé de faire un essai. Elle a rencontré Mamadou Diallo, l’acteur d’Adama lors d’un casting, mais l’avait éliminé dans sa sélection. C’est en revoyant les vidéos de son passage et en mettant les deux acteurs ensemble qu’elle a arrêté son choix. Leurs énergies étaient différentes. Lui était plus impulsif et il fallait réussir à le canaliser sur le tournage, elle était très timide et peureuse, tout l’inverse de son personnage. Les lycéens se sont également interrogés sur les conditions de la fabrication du film. Prenant place au Sénégal, les dialogues étaient en peule. Le tournage a été particulièrement éprouvant, à cause de la chaleur.
Une élève a interrogé Ramata-Toulaye Sy sur la réception de Banel & Adama dans son entourage, plus particulièrement sa famille. La réalisatrice a indiqué que ses parents avaient vu le film, sans faire de commentaire. Mais elle est consciente qu’ils ont des visions du monde particulièrement différentes, sa mère ayant grandi au Sénégal et elle en France. Le film a connu une bonne réception, notamment en festivals, où il a été projeté en compétition officielle du Festival de Cannes.


Un élève lui a demandé comment elle réussissait à jongler entre plusieurs projets en même temps. Travaillant actuellement sur quatre scénarios, Ramata Toulaye-Sy a précisé qu’elle écrivait de chez elle et qu’elle alternait selon les jours ou les demi-journées. Elle n’a pas d’horaires précis, pas de week-end défini et, surtout, pas de sécurité financière. Si elle met 6 mois à rendre un travail, elle n’est pas payée pendant ce temps, raison pour laquelle il est nécessaire d’avoir toujours plusieurs projets en cours.
Ramata-Toulaye Sy a également évoqué sa passion pour la littérature, qui l’a amenée vers le cinéma et son approche scénaristique. « J’écris avec des idées d’émotions », a-t-elle affirmé. Questionnée sur son regard en tant que professionnelle, la scénariste a indiqué qu’elle avait naturellement un œil critique en regardant un film et avait perdu sa naïveté de spectateur, ce qu’elle trouve dommage.
Vers la fin de la rencontre, un élève de l’option théâtre s’est osé à demander comment il pouvait jouer dans l’un de ses films…Et les lycéens l’ont conviée à la représentation de leur spectacle de fin d’année, une invitation que Ramata-Toulaye Sy a acceptée avec joie.