Séphora Pondi_© Dédé Anyoh
Séphora Pondi
Comédienne
Lycée Jean-Baptiste Corot, Savigny-sur-Orge (91)
4 avril 2024
Ce dont nous avons honte, nos défauts, c’est souvent tout cela qui fait notre force en tant qu’artiste.

160 élèves/ 2nde, 1ère et Terminale/ 5 professeurs de français

C’est avec une émotion non dissimulée et une certaine excitation que la comédienne et pensionnaire de la Comédie Française, Séphora Pondi, est revenue pousser les grilles de l’ancien château, également ancien établissement de l’artiste, le lycée Charles Corot à Savigny-sur-Orge (91). Ce moment unique fut l’occasion pour la comédienne de revenir sur les lieux de son adolescence pour échanger avec les élèves. L’établissement a joué un rôle clé pour Séphora Pondi qui en a gardé un souvenir merveilleux, marquant le début d’une longue histoire d’amour avec le théâtre. Avec une joie non dissimulée, elle a pu y échanger avec 160 lycéens, autour de son parcours, des bancs de l’école à la scène, ainsi que sur ses différents rôles et son quotidien en tant que pensionnaire de la Comédie Française.

Après une visite du somptueux lycée entouré de ses douves et fort d’un terrain de plusieurs hectares, Séphora Pondi n’a pas perdu ses repères. De la cantine en passant par la salle des professeurs, jusqu’à la salle de théâtre, les lieux semblent avoir gardé toute leur authenticité.

La salle de théâtre, également salle de conférence pour cette rencontre, est le lieu dans lequel la comédienne a fait ses premières représentations sur scène, il y a maintenant 15 ans. Ce saut dans le temps ne manqua pas d’émouvoir Séphora Pondi, qui, les larmes aux yeux, ne put s’empêcher de monter sur scène pour faire face à la salle, une forme d’hommage à la lycéenne qu’elle a été. 

Ancienne élève du lycée Charles Corot, comédienne et pensionnaire de la Comédie Française, l’artiste est aujourd’hui âgée de 31 ans. Séphora Pondi a amorcé la rencontre avec cette rapide présentation avant de laisser rapidement la parole aux lycéens : « je n’en dis pas plus, histoire de vous laisser me poser les questions qui vous intéressent ». Dès le début de la rencontre, de nombreuses mains se sont levées, témoignant de l’intérêt suscité par le parcours de Séphora.

Interrogée sur ses études, l’artiste a révélé qu’elle n’avait pas toujours eu pour ambition de devenir comédienne. Bien qu’aimant la lecture, ce n’est qu’au lycée qu’elle a découvert sa passion pour le théâtre. Après le baccalauréat, elle a intégré une école publique de théâtre à Évry, avant de passer les concours nationaux et de rejoindre l’école ERACM (École Régionale D’acteurs de Cannes et Marseille). Ce n’est que plus tard, après quelques années en tant qu’intermittente du spectacle, que la comédienne est repérée par la Comédie Française. Elle a souligné que l’entrée dans cette prestigieuse institution prend parfois beaucoup de temps. La comédienne a raconté aux élèves qu’il a fallu près de deux ans entre le moment du repérage et son intégration en tant que pensionnaire.

Puis les élèves se sont interrogés sur la manière dont Séphora Pondi travaillait ses différents rôles, les textes, ainsi que le processus artistique pour se mettre dans la peau d’un personnage (caractère, manière de se mouvoir, d’interagir avec son environnement, l’histoire ou encore les autres comédiens…).

Pour rendre ses personnages « vivants », Séphora Pondi a expliqué miser grandement sur l’apprentissage théorique du rôle et des textes, tout en les imbibant de sa propre existence. Elle considère que l’essence d’une bonne interprétation réside dans la capacité du comédien à insuffler une partie de lui-même dans le rôle. Quant à la question de savoir quand elle a trouvé le juste ton pour un personnage, Séphora a souligné l’importance du dialogue avec le metteur en scène, qui apporte un regard extérieur et guide l’interprétation. En effet, d’un metteur en scène à l’autre, ce ne sont pas les mêmes demandes. Elle a donc conclu en rappelant qu’évidemment, le métier même du comédien est de donner vie aux personnages, via sa propre interprétation, sa compréhension du personnage et sa sensibilité, mais il travaille toujours en collaboration avec les metteurs en scène.

S’exprimant sur les difficultés du métier de comédienne, Séphora a évoqué le sentiment d’isolement social et d’éloignement culturel qu’elle a pu ressentir, notamment lors de son entrée à la Comédie Française, institution souvent associée à une certaine bourgeoisie. Elle a expliqué avoir ressenti beaucoup de colère au départ, et s’était mise énormément de côté se créant sa propre prison. Prison qu’elle a progressivement quittée, le temps d’apprivoiser son environnement professionnel. Malgré ces défis, elle a souligné l’importance de dépasser les obstacles et de cultiver l’ouverture d’esprit.

Suite à des questions de lycéens concernant son passé au sein du lycée, Séphora Pondi a évoqué avec nostalgie la découverte du théâtre et ses grandes amitiés qui ont perduré depuis. Elle s’est souvenue avec émotion de ses anciens professeurs, dont l’une – professeure de littérature – était présente dans le public ce jour-là. Elle a d’ailleurs confié que son déclic pour devenir comédienne est survenu lorsqu’elle a découvert le théâtre en seconde, grâce à une surveillante qui avait lancé un atelier théâtre. Elle a alors réalisé sa passion pour cet art et n’a plus jamais regardé en arrière.

Une élève lui a ensuite demandé : « quels conseils donneriez-vous à une jeune personne qui souhaite devenir comédienne ? ». Pour celles et ceux qui aspirent à suivre ses pas, Séphora Pondi a conseillé de prendre des cours, de voir un maximum de spectacles et de lire beaucoup. 

Elle a également insisté sur l’importance de ne pas craindre ses propres défauts, car ce sont souvent eux qui font la force des artistes : « Ce dont nous avons honte, nos défauts, c’est souvent tout cela qui fait notre force en tant qu’artiste. ». Elle en a profité pour rappeler que ce métier est aussi là pour faire vivre des expériences, des émotions aux spectateurs. Interrogée sur ce qui la pousse à se dépasser sur scène, Séphora Pondi a évoqué le risque et le vertige inhérents à cet exercice, ainsi que l’obligation de remplir son rôle vis-à-vis du public. C’est tout cela qui constitue le carburant de la comédienne, et qui la pousse chaque jour à se lever et mettre du sens dans sa pratique artistique.

Enfin, la comédienne a évoqué l’impact de la crise Covid sur sa carrière, expliquant avoir vécu cette pandémie en deux temps. Elle a avoué avoir trouvé un certain réconfort lors du premier confinement, qui lui a permis de se reposer et faire une pause dans le rythme intense qui était celui de sa vie d’artiste. Mais lors du deuxième confinement, elle a reconnu avoir éprouvé beaucoup de craintes quant à l’avenir des salles de théâtre ainsi que la survie de son métier. Heureusement, la Covid n’aura pas eu raison de son art et ni entaché l’amour des Français pour la culture et notamment le théâtre.

En conclusion de cette riche rencontre, une élève a demandé à Séphora Pondi ce qu’elle dirait à la lycéenne qu’elle a été il y a 15 ans : « je lui dirais de ne rien changer. Vraiment rien !!! ». Et c’est sur ce témoignage de son amour et de sa passion indéfectible pour son métier de comédienne que Séphora Pondi a conclu l’échange sous un tonnerre d’applaudissements.