140 élèves de seconde et terminale
Le scénariste Gilles Marchand a fait un retour émouvant dans son ancien établissement, le lycée Marseilleveyre à Marseille. Entré il y a 30 ans dans l’établissement, le scénariste en a repassé les portes pour venir échanger avec plus d’une centaine d’élèves. Au cours de cette rencontre, Gilles Marchand a partagé ses souvenirs, évoqué sa carrière de scénariste, et abordé son film « La nuit du 12 », qui lui a valu le César 2023 de la Meilleure Adaptation. Cet échange fut également l’occasion pour l’artiste de répondre aux nombreuses questions des étudiants, dont nombreux se sont montrés fascinés par le monde du cinéma.
Après la traditionnelle visite des lieux, le scénariste a pu longuement échanger avec les élèves, curieux et attentifs. Gilles Marchand a d’abord évoqué ses années collège/lycée et son amour déjà « fou » pour le cinéma, expliquant aux élèves qu’à l’époque, il n’existait pas de cursus spécifique pour les personnes intéressées par les métiers du cinéma. Certains enseignants lui avaient d’ailleurs conseillé de ne pas se projeter dans ce projet professionnel, beaucoup trop incertain et peu documenté à l’époque. Le scénariste a ainsi expliqué avoir mis de côté « ce rêve idiot » jusqu’en Terminale où, suite à des rencontres amicales, des discussions, il a pu exprimer sa volonté de faire du cinéma et d’écrire des films.
L’artiste n’a pas hésité à encourager les élèves à suivre leur rêve, puisque lui-même a décidé de réaliser les siens en passant le concours de la Fémis à l’âge de 18 ans. Concours qu’il a réussi et grâce auquel il a fait des rencontres marquantes, comme Dominik Moll, avec lequel il travaille sur de nombreux projets depuis plus de 30 ans. Le mot d’introduction de l’artiste était clair : s’autoriser à croire, faire et vivre de sa passion.
Les élèves, aux questions nombreuses et pertinentes, ont interrogé le scénariste sur les chemins à emprunter pour exercer ce métier. Gilles Marchand leur a répondu en toute honnêteté évoquant notamment les contraintes du secteur, ainsi que les chemins et détours que tout artiste peut rencontrer. Les places sont chères, a-t’il affirmé, tout en rassurant les élèves en leur expliquant que, ce qui compte réellement, ce sont les profils qui ont une identité propre, une identité nourrie par la passion du cinéma. Selon l’auteur ; nul besoin d’être un profil très scolaire, ce qui fait la différence dans ce secteur, c’est la singularité, la passion et la persévérance.
Gilles Marchand a d’ailleurs confié aux lycéens que son chemin n’a pas été facile, mais pour autant très heureux, leur racontant son début de carrière partagé entre l’écriture de scénarios et des petits jobs de photographe ou d’assistanat sur des films afin de subvenir à ses besoins. Gilles Marchand est également revenu sur les doutes qui peuvent assaillir tout artiste en construction professionnelle. Il a expliqué qu’il s’agit d’un processus souvent très long – 13 ans pour lui – qui nécessite de la patience, de la volonté, mais aussi un bon entourage. Suite à la question d’un élève, le scénariste est revenu sur l’importance d’être bien entouré lors de ces périodes d’incertitudes personnelles et professionnelles.
Puis l’échange s’est poursuivi avec des questions des élèves autour de questions plus spécifiques à l’écriture d’un scénario, l’inspiration, les phases de conception d’une histoire, la création des personnages… Gilles Marchand est d’abord revenu sur le long travail que représente la conception d’un film entre l’écriture et le tournage, ainsi que sa place en tant que scénariste dans toute la phase de création de l’œuvre. Il a confié aux élèves se rendre régulièrement sur les plateaux de tournage afin d’échanger avec réalisateurs et producteurs, suivre les castings et s’intéressant à tout le processus de création, même à la fabrication des décors ou costumes, … L’artiste est également revenu sur l’importance du travail collectif ; « C’est en s’épaulant les uns les autres que l’on crée des films. Le cinéma c’est souvent une chose collective. Profitez d’être réunis pour faire et construire des choses ensemble ! ».
Toujours perspicaces, les élèves ont relancé l’artiste sur les particularités de l’écriture d’un scénario, notamment celle de son film La nuit du 12. Gilles Marchand a commencé avec la métaphore de la graine. Un scénario, leur a-t-il expliqué, c’est une graine dont on est capable d’imaginer la forme finale, et qui va grandir, se déployer, s’enrichir, jusqu’à devenir un film, l’œuvre entière. Un bon scénario, c’est une idée (une graine) que l’on souhaite mettre en images. Pour cela, l’artiste a expliqué qu’il était nécessaire de convaincre les producteurs et réalisateurs. Un bon scénario doit donc aller à l’essentiel, tout en réussissant à créer un monde pour celles et ceux qui le lisent, afin de leur donner envie de le mettre en images. Il a également expliqué qu’au cours de l’écriture d’un scénario comme La nuit du 12, il est tout à fait normal de rencontrer des phases de doute. Néanmoins, il a rappelé aux élèves que l’intuition sur la pertinence du projet est une vraie boussole ; il ne faut pas avoir peur de lui faire confiance.
Concernant l’imagination, le scénariste a répondu aux élèves que l’inspiration, tout comme la réalisation d’un film, est pour lui un travail d’équipe. La naissance d’un scénario est selon lui souvent le fruit de discussions, de partage d’idées, de conversations, d’échanges d’inspirations comme la lecture de livres. Il a également conseillé aux jeunes d’être tout le temps en alerte, à la recherche d’idées sur ce qui les intéresse, les nourrit, sur ce qu’ils lisent, voient, écoutent, les personnes qu’ils rencontrent, les discussions avec leur entourage…
Enfin, Gilles Marchand a tenu à souligner l’importance des personnages dans la rédaction d’un scénario et la création d’une histoire vivante et percutante. Le scénariste a expliqué aux lycéens que les personnages sont essentiels pour la qualité du film et son incarnation. En réalité, il s’agit d’une très grosse partie de sa réussite
L’histoire est certes importante, mais elle ne peut prendre vie qu’à travers les personnages. De même que le choix de l’acteur ou l’actrice pour incarner un personnage. Quand on choisit la bonne personne, le potentiel est décuplé. Gilles Marchand a partagé ses conseils aux élèves concernant la création de personnages : « tout réside dans l’observation ». L’écriture d’un personnage, d’un dialogue, est un vrai travail d’écoute. Plus nous sommes attentifs à notre environnement, plus nous sommes capables de le reproduire.
Un très bel échange placé sous le signe du cinéma et de l’écriture, grâce à la générosité d’un scénariste aussi passionnant que passionné.