
67 élèves de première générale, 68 élèves de seconde générale et technologique, accompagnés par leurs professeurs et professeures.
Chaleureusement accueillie par Stéphane Schmitt, professeur documentaliste, Ninon Chapuis est revenue sur les traces de son adolescence au Lycée Jean Monnet, à la Queue-Lez-Yvelines, où elle a été scolarisée entre 2004 et 2007. Après un repas à la cantine et une visite de l’établissement, elle est allée à la rencontre de 135 élèves, avec qui elle a échangé sur son parcours et son métier, au cours de deux interventions d’une heure. Lors de ces deux temps d’échange, elle s’est d’abord présentée avant d’engager la discussion et de répondre aux questions des élèves.
Ses années de lycée ont été marquées par la rencontre d’un groupe d’amis avec qui elle est toujours en lien aujourd’hui. À cette époque, elle ne savait pas encore ce qu’elle voulait faire ; le métier de productrice n’était pas une vocation. Elle savait toutefois que le monde artistique la touchait et avait l’intuition qu’elle souhaitait travailler avec des artistes, être proche de la création, dans une logique d’accompagnement. Ninon Chapuis n’a cependant pas écouté cette intuition, poussée par son entourage vers une autre direction. Après le baccalauréat, elle a intégré une classe préparatoire, puis Sciences Po Bordeaux, où elle se destinait à devenir assistante parlementaire, sans réelle envie.

Ce n’est que six ans plus tard que Ninon Chapuis a suivi son désir, en intégrant la Fémis (école nationale supérieure des métiers de l’image et du son) au sein du département Distribution-Exploitation.

« Faites ce qui vous intéresse. Quand vous avez une intuition, il faut y aller et tenter de résister aux 12 000 avis que votre entourage vous donnera. »
Au fil du temps, son parcours s’est construit à travers ses stages et expériences dans la production et la distribution, l’amenant au métier de productrice. Elle a témoigné s’être beaucoup comparée, à ses débuts, aux gens de son âge travaillant dans la production sans avoir fait de longues études. Avec le temps, elle s’est cependant rendu compte que ces mêmes personnes éprouvaient souvent un sentiment inverse, regrettant de ne pas avoir poursuivi d’études. Elle a ainsi affirmé que le chemin de chacun est individuel et ne saurait être comparé. Par ailleurs, ses études lui ont permis d’acquérir des outils qu’elle exploite au quotidien et de comprendre le secteur dans lequel elle évolue.
Ninon Chapuis a intégré en 2018 la société indépendante Rezo Productions. Un an plus tard, avec deux amis et associés, elle a fondé sa propre société de production, L’Heure d’Été. Évoquant la collaboration avec ses associés, elle a expliqué leur manière de travailler ensemble sur les projets.
Elle a ensuite précisé ce qu’est concrètement le métier de productrice et son rôle dans les différentes étapes de la création d’un film. Il consiste à accompagner les artistes dans la conception de leur film, dès la phase de recherche et d’écriture. En tant que productrice, elle reçoit de nombreux scénarios, mais son travail consiste également à aller chercher des projets, notamment en festival, où elle visionne beaucoup de films et contacte les réalisateurs et réalisatrices lorsque leur univers lui plaît. Elle peut aussi être à l’origine d’une idée de projet, qu’elle fera ensuite développer en trouvant un ou une scénariste. Cette phase de développement et de suivi de l’écriture peut durer plusieurs mois, voire plusieurs années.
Une fois le scénario rédigé, le coût du film est évalué, et son rôle est alors de trouver des financements, une étape qui peut s’étendre sur plusieurs années. Cette phase n’est pas évidente, notamment dans son cas, car elle accompagne des films d’auteurs indépendants. Les budgets obtenus sont souvent inférieurs à ceux prévus, ce qui nécessite parfois une réécriture du projet afin que sa réalisation reste compatible avec le financement disponible. Puis vient l’étape de fabrication du film, qu’elle accompagne également, précédée par la constitution de l’équipe technique. Enfin, elle doit faire du lobbying auprès des festivals pour que le film y soit présenté.
Elle a ainsi tenu à souligner que, contrairement à l’imaginaire collectif autour du métier de producteur, celui-ci ne se réduit pas à la recherche de financements. Ce qu’elle préfère d’ailleurs, c’est l’accompagnement des artistes et le suivi de l’écriture d’un scénario.
« Dans l’esprit de beaucoup de monde, un producteur, c’est celui qui va chercher l’argent pour financer un film. Mais la réalité est bien différente. En fait, c’est l’accompagnateur des auteurs, des artistes, des cinéastes. Il rentre dans leurs univers et fait tout pour que le film existe. »
Les élèves qui avaient visionné Été 96, film pour lequel Ninon Chapuis a reçu le César 2024 du Meilleur court métrage d’animation, ont posé de nombreuses questions à ce sujet. Elle leur a expliqué qu’avant ce film, elle n’avait jamais produit de film d’animation, un genre assez éloigné de sa cinéphilie.


Très amie avec la réalisatrice Mathilde Bédouet depuis son enfance, elle a raconté qu’il s’agissait à l’origine d’une blague entre elles, d’une histoire d’amitié. Mais elle suit depuis longtemps le travail artistique de son amie, dont elle aime les dessins et l’univers, et s’est ainsi lancée dans le projet avec l’envie d’apprendre à produire de l’animation.


Ninon Chapuis a également partagé, à travers de nombreuses anecdotes, le développement du projet de Mathilde Bédouet, qui s’est appuyée sur de vieilles cassettes familiales pour écrire le scénario, et a expliqué la technique particulière de la rotoscopie, utilisée pour réaliser le film. Cette technique consiste à tourner le film avec de vrais acteurs, puis à retranscrire chaque image en dessin. Pour réaliser un tel film d’animation, huit dessins par seconde sont nécessaires, ce qui a conduit Mathilde Bédouet à produire environ 5500 dessins, réalisés au crayon de couleur sur papier, pour douze minutes de film.
Les deux amies et leur équipe renouvellent actuellement cette expérience avec un nouveau film, basé sur la même technique, qui sera un peu plus long.
L’échange a également porté sur le cinéma français et l’industrie en général, sur le développement des plateformes de streaming et leurs influences sur son travail, ainsi que sur la rémunération des réalisateurs et réalisatrices et des producteurs et productrices.
Enfin, les élèves ont interrogé Ninon Chapuis à plusieurs reprises sur les conseils qu’elle pourrait donner à ceux qui souhaitent devenir producteur ou productrice et travailler dans l’industrie du cinéma. Ce à quoi elle a répondu qu’elle n’avait pas de conseil précis pour accéder à ce métier, car tous les parcours sont différents et se valent, particulièrement en production. Elle a toutefois souligné l’importance de rester curieux, de savoir encaisser les frustrations et d’être patient, car la réalisation d’un film est un processus très long, et la recherche de financements, souvent très laborieuse. Pour conclure, elle a insisté sur le fait que ce qu’elle recommande avant tout, c’est de faire un maximum de stages, car c’est un milieu où le réseau joue un rôle primordial.
Crédit photo : Vincent Mottez pour l’Académie des César 2024
PRESSE
78 actu – 05/03/2025
Article du Lycée polyvalent Jean Monnet n°1 – mars 2025
Article du Lycée polyvalent Jean Monnet n°2 – mars 2025
tv78 – 12/03/2025