Marie-Ange Luciani
Marie-Ange Luciani
Productrice
Lycée Lætitia Bonaparte, Ajaccio (20)
15 janv.
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80 élèves, soit une classe de Première, une classe de Terminale, les élèves de l’option théâtre et de l’option vidéo (tous niveaux), des élèves de spécialité Histoire géographie et sciences politiques de Terminale / une professeure d’Arts Plastiques, une professeure d’Italien, un professeur d’Atelier vidéo et deux professeures documentalistes.

Souvent de retour à Ajaccio, Marie-Ange Luciani passe régulièrement devant les portes de son ancien lycée. Mais c’était la première fois depuis son adolescence qu’elle remettait les pieds dans l’établissement, grâce au dispositif Un César à l’école. Ce retour aux sources a été chargé en émotions, entre retrouvailles avec d’anciens professeurs et discussions avec la jeune génération. 

La productrice émérite d’Anatomie d’une chute a été bien accueillie par les enseignants du lycée et plus particulièrement par son ancienne professeure d’italien qui l’avait tant marquée adolescente. Cette dernière avait sauté sur l’occasion de faire participer ses élèves à cette rencontre inédite. Lors de deux sessions de discussion avec les élèves, l’une le matin et l’autre l’après-midi, Marie-Ange Luciani s’est remémorée ses souvenirs de lycée, une période de découvertes culturelles notamment grâce à ses enseignants : « Pour moi, l’école a été d’une importance capitale, car ça m’a ouvert à plein de choses­­­ ». 

Marie-Ange Luciani devant l'établissement

Lycéenne, elle exprimait déjà un certain intérêt pour l’art et la culture, plus particulièrement la littérature et le cinéma. Elle se rendait régulièrement au Laetitia, le cinéma d’art et essai d’Ajaccio. À cette époque, les films restaient à l’affiche plusieurs semaines et elle allait revoir ses préférés en boucle. Cependant, elle n’envisageait pas pour autant une carrière dans le cinéma, manquant de connaissance concrète sur les différents métiers possibles dans ce secteur. « Pour moi, le cinéma, c’était acteur ou réalisateur », a-t-elle précisé, évoquant avec les élèves la pression et les difficultés liées à l’orientation professionnelle.

« J’ai découvert que je voulais être productrice à 25 ans ».

Après son baccalauréat, Marie-Ange Luciani a quitté la Corse pour suivre des études de littérature, entamant une thèse sur la construction de l’identité de personnage. Mais elle éprouvait un besoin de concret. Elle finit par suivre un diplôme plus technique, un DESS en administration du spectacle, enchaînant différentes expériences et stages. Un chemin qu’elle a recommandé aux élèves intéressés par la production et le cinéma. « J’ai toujours eu l’impression que producteur, ça ne s’apprend pas à l’école » a-t-elle expliqué. Lors d’un stage en distribution, elle finit par rencontrer Gilles Sandoz, un producteur qui l’a prise sous son aile et lui a appris les ficelles du métier de producteur.

Marie-Ange Luciani a expliqué aux lycéens en quoi consiste son métier de productrice, du développement du scénario à la distribution du film. Dans un premier temps, un réalisateur ou une réalisatrice vient la voir avec une idée de projet. Marie-Ange Luciani accompagne l’écriture du scénario, en faisant régulièrement des retours et des points d’étapes. Il faut compter environ un an et demi pour finaliser un scénario.
Une fois l’écriture avancée et le budget prévisionnel établi, une nouvelle étape commence : la productrice doit trouver et convaincre des sources de financement. Si elle n’arrive pas à récolter le budget estimé, il faut faire des choix, des coupures dans le scénario. Ensuite, elle complète l’équipe du film et entre en préparation de tournage pendant environ 8 semaines pour régler les détails logistiques. Vient le tournage, sur lequel elle se rend généralement. Chaque soir, elle visionne aux côtés de l’équipe les rushs tournés durant la journée pour valider les prises. Après le tournage, s’enchaînent la post-production, la diffusion et la distribution du film. Produire un film prend 4 à 5 ans. La productrice a évoqué l’importance de la dimension sociale dans son travail et dans le choix de ses productions : « C’est l’humain que je choisis avant le projet » Elle a également insisté sur la double dimension de son métier :

« En même temps, il faut une approche artistique, mais aussi des capacités à financer, à mettre en relation des gens. (…) Le producteur doit veiller à tout ».

Selon son expérience, la production est un secteur difficile, où l’on entend beaucoup de « non » pour un « oui », mais c’est aussi un métier très stimulant, où l’on apprend constamment. Et c’est possible d’y arriver !

La discussion a également tourné autour de l’accès à la culture et aux métiers artistiques en Corse. Marie-Ange Luciani a l’impression que la situation évolue, bien qu’il reste encore un long chemin à parcourir. Elle a mentionné les tournages locaux qui se multiplient, permettant un ancrage régional et donnant naissance à des films qui s’exportent et rencontrent un certain engouement, bien qu’ils abordent des sujets généralement dramatiques liés à la situation socio-politique et à l’histoire de la Corse.

Un élève l’a interrogée sur le succès d’Anatomie d’une chute, film pour lequel la productrice a été récompensée d’un César et qui l’a même emmenée jusqu’aux Oscars. Marie-Ange Luciani a partagé son expérience personnelle : dix ans après le début de sa carrière, elle avait déjà connu un premier moment marquant en 2017 avec 120 battements par minute, récompensé, entre autres, du Grand Prix au Festival de Cannes. Un succès suivi par une période difficile, car elle a eu beau s’efforcer de vouloir réitérer l’expérience, cela ne fonctionne pas ainsi. Et l’année suivante, un autre film est récompensé et fait oublier le précédent. Il faut alors un temps pour prendre du recul. Cependant, ce qui change suite à ces succès critiques et publics, c’est la confiance des partenaires financiers, qui lui permet de s’atteler à des projets plus complexes et ambitieux.

« À chaque film, on recommence à zéro. (…)  Il ne faut pas se perdre dans un succès éphémère, ce qui compte, c’est le travail »

Les lycéens, très curieux et enthousiastes, ont également posé de nombreuses questions sur Anatomie d’une chute, qu’ils avaient vu en préparation de la rencontre. Marie-Ange Luciani a évoqué les défis de cette production : les scènes à couper, la neige, initialement prévue en VFX, mais finalement tombée naturellement, le casting pour le rôle de Daniel ou encore la cadence du chien à gérer lors des prises. Elle a aussi parlé de la campagne des Oscars aux Etats-Unis, une étape promotionnelle qui était nouvelle pour elle.

Pour conclure chaque rencontre, la productrice avait apporté dans ses bagages son César, qu’elle a présenté aux élèves. Ces derniers étaient plus que ravis de pouvoir prendre la statuette dans leurs mains le temps de quelques photos souvenirs. Parmi eux, un lycéen restait éloigné du trophée…Le premier César qu’il touchera, ce sera le sien, a-t-il déclaré. Cette journée restera, sans aucun doute, dans la tête de ces élèves.

« Les élèves et enseignants présents ont été enchantés de rencontrer Marie-Ange Luciani dont la joie et l’émotion de revenir dans son lycée nous ont émus. Son envie de transmettre aux jeunes générations et la qualité des échanges qui en ont découlé resteront gravés dans leur mémoire et susciteront, c’est certain, un intérêt pour la profession. » – Mme Quilici et Mme D’Orazio, Professeures Documentalistes

PRESSE :

Télé Paese (article) – 17/01/2025

Télé Paese (reportage) – 17/01/2025

Corse Matin – 18/01/2025

La Croix (via l’AFP) – 18/01/2025

L’Express (via l’AFP) – 18/01/2025

TV5 Monde (via l’AFP) – 18/01/2025

Corse Net Infos – 19/01/2025

France 3 Corse Viastella – 20/01/2025