© Patrice Normand
Florence Aubenas
Journaliste, auteure
Ecole Primaire Florence Aubenas Beaumont sur Sarthe (72)
5 juin
« Faire entrer des artistes à l’école, c’est passer de l’autre côté du tableau noir, donner un visage et une vie -ou en tout cas essayer- à ce qu’on y enseigne : la littérature, la musique, l’histoire ou les mathématiques ».

35 élèves de CE2/CM1/CM2 accompagnés par leurs professeures des écoles et la directrice

Pour Florence Aubenas, marraine de cette 13e édition d’Un Artiste à l’école, nous avons remanié la formule de notre dispositif : la journaliste n’est pas retournée dans son ancien établissement scolaire, mais a eu la joie de découvrir une école qui porte son nom.

Située à Beaumont-sur-Sarthe, non loin de Le Mans, l’école Florence Aubenas a obtenu son nom en 2022 à la suite d’une décision commune prise par les élèves. En arrivant, Florence Aubenas a été chaleureusement accueillie par les enseignantes. Réflexe de journaliste, elle leur a posé quelques questions, s’interrogeant sur la situation socio-économique de la ville.
Elle a ensuite rencontré les élèves de CE2, CM1, CM2, divisés en deux groupes. Ces derniers avaient préparé des questions, accompagnés par leur enseignante. Pour commencer cette discussion, Florence Aubenas les a prévenus : aujourd’hui, ce sont eux les journalistes. S’ ils ne sont pas satisfaits ou ne comprennent pas bien une de ses réponses, ils ne doivent pas hésiter à reposer leur question.

Rapidement, la curiosité des élèves s’est tournée vers sa période de captivité en Irak. À leur âge, cet évènement leur paraît encore difficile à concevoir. Des questions parfois candides se sont mélangées à des interrogations plus sérieuses : Pourquoi vous a-t-on kidnappé? Vos ravisseurs étaient-ils méchants ? Est-ce que c’était difficile ? Elle a expliqué le déroulement de son enlèvement, les raisons de sa prise en otage, ses conditions de détention, sa perte de poids de 12kg, le climat de peur qui régnait au quotidien…. « C’était un sale moment ». 
Une élève lui a demandé si elle avait peur de se rendre dans certains endroits. À la plus grande surprise des enfants, la journaliste a répondu intuitivement qu’elle avait peur d’être ici, dans cette école. Florence Aubenas a expliqué qu’elle avait peur de les choquer, d’employer les mauvais mots, d’aller trop loin. Pourtant, c’est avec bienveillance, franchise et pédagogie qu’elle s’est exprimée tout au long de son intervention.

« C’est une sacrée responsabilité d’être devant vous »

Au fil de la discussion, Florence Aubenas a évoqué la guerre en Ukraine où elle s’est rendue de nombreuses fois, soulignant le courage et la résilience de la population et de ses combattants. Ces quelques mots ont particulièrement résonné chez une élève qui avait quitté l’Ukraine et était arrivée à Beaumont-sur-Sarthe quelques années auparavant.
Un autre élève l’a interrogé sur les qualités requises pour être journaliste, convaincu qu’il fallait se démarquer par ses capacités de rédaction. Mais Florence Aubenas lui a apporté une tout autre réponse : « La première chose qu’on te demande, quand tu es journaliste, c’est d’envoyer ton reportage à l’heure. Il y a un côté très industriel. ». Évidemment, la curiosité est primordiale chez un journaliste.

Florence Aubenas a détaillé la diversité du secteur journalistique. Suivant sa spécialisation, un journaliste exerce un métier tout à fait différent.  « On ne fait pas du tout le même métier ». Elle prend en exemple les journalistes politiques qui se rendent à l’Assemblée nationale tandis que les journalistes orientés cinéma vont couvrir le festival de Cannes. Pour sa part, elle couvre les procès judiciaires ou se rend sur le terrain, à l’étranger.

Diverses questions se sont enchaînées : combien de langues parle-t-elle ? Est-ce que ses frais de déplacement sont pris en charge par sa rédaction ? Dans combien de pays est-elle allée ? A-t-elle déjà vu des chars d’assaut ? Quelle a été son expérience la plus difficile ?
À cette dernière question, la journaliste était hésitante. Elle s’est finalement lancée dans le récit d’un de ses souvenirs marquants lors de la guerre civile au Rwanda. Sa voiture a croisé le chemin de familles qui tentaient d’échapper aux combats. Des femmes lui ont confié leurs enfants afin de les emmener à l’hôpital le plus proche. Elle a emmené les enfants qu’elle pouvait et a contacté les organismes d’aides humanitaires sur place, mais elle s’est rendue compte de son incapacité à faire plus. Ce n’était pas sa mission, ce n’était pas son métier.
Cependant, elle ne changerait de profession pour rien au monde, a-t-elle confié, bien qu’elle manque généralement les anniversaires, les Noëls et autres fêtes de famille à cause de ses nombreux déplacements. Selon son expérience, « La vie privée et la vie professionnelle se mélangent ».

La discussion s’est terminée dans la bonne humeur. Les élèves, toujours débordant d’énergie, lui parlaient de leurs plats préférés. Sur le chemin du retour, Florence Aubenas est revenue sur cette rencontre : “Je les ai trouvés curieux, intéressés, (…) très marrants, sympathiques. (…) Cela prend une autre signification que quand on reste dans le centre des grandes villes. Il y a une vraie démarche, je la trouve d’autant plus importante.” 

Nous n’aurions pu rêver mieux que ce moment, touchant et empreint d’humanité, pour clôturer la 13e édition d’un artiste à l’école !

Presse

France Ouest (06 juin 2025)
Ma ville Le Mans (06 juin 2025)
Ici Maine (06 juin 2025)
Le Maine Libre (03 juin 2025)