A la suite de son baccalauréat et poussée par une certaine pression familiale Caroline Benjo a entamé des études de droits pour devenir avocate. Elle a évoqué cette époque comme une vraie « erreur d’aiguillage » mais en a souligné l’importance, car selon elle c’est aussi dans ces moments-là que l’on peut se rendre compte de ce que l’on veut réellement. Un discours qui a déjà semblé rassurer quelques élèves. Profondément malheureuse de ce premier choix d’orientation, elle a alors décidé d’arrêter ses études pour prendre le temps de trouver ce qu’elle voulait faire, renouant au passage avec son amour de la lecture. Elle sera finalement inscrite en classe préparatoire de lettres, ce qui la mènera à Paris, puis à Normal Sup, dont elle ressortira diplômée et armée d’un groupe d’amis avec lesquels elle participera au lancement de la revue Avancée cinématographique, connue désormais sous le nom de Vertigo.

Après son diplôme, Caroline Benjo a enseigné quelque temps le cinéma, à la fac d’Aix-en-Provence, avant de partir au Canada. C’est là-bas qu’elle a continué à explorer son goût pour le cinéma et y a trouvé un moyen de fréquenter les plateaux en pratique, après les avoir explorés de fond en comble théoriquement, à travers ses études et les cours qu’elle donnait. En effet, Caroline Benjo dont les diplômes n’étaient pas très utiles au Canada pour travailler dans le cinéma s’est appuyée sur sa maîtrise de la photographie se convertisseur alors en photographe de plateau, au plus près de la caméra, ce qui lui permit ainsi de découvrir comment on fabrique des films. A son retour en France, au fil des rencontres, elle a finalement intégré une très jeune boîte de production, Haut et Court, qu’elle n’a jamais quittée. La productrice a insisté sur le fait que ce sont finalement tous ces retournements d’orientation et toutes les rencontres faites au fil de ces derniers, qui l’ont menée là où elle est aujourd’hui.

La Nuit du 12, que tous les élèves avaient vu avant la venue de Caroline Benjo, a aussi occupé une certaine place dans la discussion ; parfois comme exemple sur lequel s’appuyait la productrice pour illustrer ses propos, souvent comme déclencheur de discussions plus sérieuses, les élèves cherchant alors à savoir la signification de telle ou telle scène, la difficulté ou non de financer un tel film ou l’objectif des créateurs et des producteurs quant à la façon d’aborder les violences faites aux femmes à travers ce récit, d’où leur est venue l’idée, comment les comédiens et comédiennes ont été choisies…entre autres nombreuses questions que le film, très apprécié par le public présent, a soulevées.

Une jeune fille à l’intérêt palpable pour la productrice a aussi voulu discuter avec Caroline Benjo de son engagement dans le collectif 50/50. Cette dernière a raconté avec sincérité la genèse de ce mouvement, dont elle fait partie, et son objectif, qu’elle soutient avec ferveur. Honnête, elle a souligné cependant que ce sont surtout les adhérentes les plus jeunes qui s’en sont emparées, notamment pour mener des actions et faire bouger les choses, ce qu’elle trouve formidable. Elle a d’ailleurs incité les élèves à ne rien lâcher, de ce côté-là non plus, car ils font aussi partie de cette nouvelle génération, qui abordera sûrement le secteur du cinéma autrement.

Enfin il a été difficile de mettre un terme à la rencontre, tant les élèves semblaient avoir encore des questions et l’envie de débattre. Caroline Benjo, elle, les a laissés sur un message portant sur la bienveillance : partant du principe que les personnes avec lesquelles elle avait envie de travailler sont talentueuses – et il faut l’être, pour perdurer dans ce secteur ! – elle aime fondamentalement travailler avec ceux qui sont gentils, bienveillants, et permettent une ambiance de tournage sereine. La rencontre semble avoir convaincu et inspiré les élèves, l’une d’entre elles se réjouissant même « ça m’a donné l’envie de créer ! ».